Face à la multiplication des langues dans de nombreux pays, l’enseignement dans la langue première des élèves apparaît comme un levier essentiel pour favoriser leur réussite scolaire. Soutenue avec force par l’UNESCO depuis 1950, cette approche pédagogique présente en effet de nombreux bénéfices avérés, de la confiance en soi des enfants à de meilleurs résultats académiques. Cet article met en lumière les principaux avantages d’une éducation dispensée dans la langue maternelle des apprenants
La langue maternelle est la première langue l’enfant dans laquelle il a appris à parler. Ainsi, un petit Haïtien, de mère et de père haïtiens, né et élevé en Chine a plus de chance d’avoir le chinois pour langue maternelle. De plus, la langue maternelle n’est pas nécessairement la première langue de la mère ou du père ; ce n’est même pas toujours leur langue principale. Même si elle a la même appellation que la langue enseignée à l’école, il peut s’agir d’un dialecte, apparenté à cette dernière par son origine, mais en réalité si éloigné d’elle qu’il est presque inintelligible pour l’enseignant. Dans un même pays, il peut y avoir différentes communautés linguistiques, ce qui peut faire qu’il y ait plusieurs langues actives à l’intérieur même de ce pays. Cela peut arriver à cause de la mondialisation, des vestiges de l’esclavage ou de cohabitation de peuples qui ne cohabitaient pas forcément ensemble avant. C’est le cas des Ouïghours en Chine qui parlent turc ; à Los Angeles, un élève sur cinq n’est pas de langue maternelle anglaise ; la première ville portoricaine du monde ne se trouve plus à Porto Rico, mais à New York ; Miami est une ville cubaine de première importance où l’espagnol est une langue officielle. Le nombre de langues, à l’intérieur de chaque État, ne dépend ni du nombre d’habitants, ni de la superficie. Ainsi, dix-huit langues différentes sont parlées sur le minuscule territoire du Suriname contre trois au Japon, si l’on compte l’idiome de la minorité coréenne d’un demi-million de personnes et la langue aïnou, qui est en voie d’extinction. Ces situations forment ce qu’on appelle des minorités linguistiques.

Depuis 1950, l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) encourage l’éducation dans la langue maternelle. Audrey Azoulay, directrice générale de cette organisation, a déclaré : “Les langues maternelles sont des alliées précieuses dans l’objectif d’atteindre une éducation de qualité pour tous.” Car finalement, “Elles sont le premier moyen de traduire véritablement le sens du monde et de faciliter la compréhension par l’enfant de l’essence de son environnement,” selon le Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, Tijjani Mohammed-Bande.
Il est maintenant prouvé que l’enfant qui arrive à l’école n’est pas une feuille blanche sur laquelle on va écrire. L’enfant qui arrive à l’école est déjà un être conscient avec déjà une conception du monde. Cette conception du monde est acquise dans sa communauté et bon nombre de ce qu’il connaît avant d’aller à l’école, il l’a appris par le biais de sa langue maternelle. L’enfant qui arrive à l’école sait déjà comment on dit “âne”, “maman”, “canal”… dans sa langue. Cet acquis qui ne lui a pas été enseigné est appelé “connaissance procédurale.” La connaissance procédurale, c’est tout ce que l’enfant connaît déjà par le biais de sa langue. Donc, enseigner l’enfant dans sa langue maternelle c’est une continuité “académique” de ce que l’enfant connaît déjà. Dans cet environnement, l’enfant aura une confiance en soi, ce qui n’est pas le cas quand, arrivé à l’école, l’enfant est confronté à une langue qui lui est étrangère et dans laquelle il doit réapprendre tout ce qu’il est censé déjà connaître.

D’autres avantages soulignés par l’UNESCO d’un enseignement en langue maternelle dès le plus jeune âge sont que les enfants sont plus nombreux à fréquenter l’école et à y obtenir de bons résultats, les parents ont plus de facilité à communiquer avec les enseignants et à accompagner leurs enfants dans leurs devoirs, les filles et les enfants des zones rurales qui ont moins de contact avec les langues dominantes poursuivent leurs études plus longtemps et ont moins tendance à redoubler, et dans un environnement d’enseignement multilingue, les enfants ont tendance à acquérir de meilleures aptitudes à la réflexion que dans un environnement monolingue.
Cependant, certaines questions se posent encore. Le peu de données écrites qui existent dans ces langues ne ralentirait-il pas la machine éducative ? Peut-on organiser un programme d’éducation qui pourrait satisfaire les besoins linguistiques de tous ? L’éducation en certaines langues (trop) minoritaires n’occasionnerait-elle pas une exclusion des éduqués face à la mondialisation ?
Jocelyn Godson HÉRARD, Copywriter H-translation
Très intéressant !!!